Le Roi est dans les champs

Eloul, le dernier mois de l’année juive, est un temps de paradoxe.

Le calendrier juif distingue 2 qualités de temps:
-        jours de travail ” mondains’ et
-         jours ‘Saints’ comme le shabbat et les jours de fête.
Shabbat est un jour de désintérêt de  tout ce qui est matériel, un jour dédié à la poursuite spirituelle
d’étude et de prière. Les fêtes qui parsèment l’année d’oasis transcendant le temps, chacune
amenant sa qualité unique spirituelle (liberté a pâques, crainte à rosh hashana etc.) a celui qui
voyage a travers le calendrier et la vie.

A ce sujet, eloul, ressemble aux parties ‘Saintes du calendrier. Eloul est un oasis dans le temps, une
cité de refuge  contre les ravages de la vie matérielle, un temps d’introspection pour vérifier le
compte spirituel de chacun et d’estimer l’année qui vient de passer. Pour se préparer aux ‘Grands
jours’ de rosh hashana et Yom kipour en regrettant les échecs du passé et prenant de bonnes
décisions pour le futur…Pour s’immerger dans l’étude de la Torah, prière et charité. Eloul est le
temps opportun pour tout cela parce que c’est un mois dans lequel D-ieu entretient une relation
avec nous d’une façon plus ouverte et compassionnée que dans n’importe quel autre mois. Dans la
terminologie de la Kabala, c’est un temps ou les 13 attributs de miséricorde de D-ieu illuminent Sa
relation avec nous.

Et pourtant, a la différence de Shabbat et des fêtes, les jours de Eloul sont ‘profanes’. Pendant
shabbat, la torah nous commande de cesser toutes activités constructives (melacha). Les fêtes
aussi, sont des jours ou la melacha est interdite. Au sujet du mois d’Eloul, néanmoins, il n’y a pas
ces restrictions. Les activités transcendantes d’Eloul sont conduites au milieu de notre vie
quotidienne de travail, dans les champs, magasin ou bureau.

Le Roi est dans les champs

Rabbi Schneour Zalman de Liadi explique le paradoxe d’Elloul avec la métaphore suivante:
La place régulière du roi est dans la capitale, dans le palais royal. Celui qui souhaiterait approcher
le Roi  doit aller suivant les voix appropriées par la bureaucratie du palais et ainsi gagner la
confirmation d’une succession de secrétaires royaux et ministres. Il doit voyager jusqu’a la capitale
et passer les différentes et nombreuses portes, couloirs, et antichambres qui amènent au trône. Sa
tenue doit être méticuleusement préparée, et il doit adhérer à un strict code vestimentaire, verbal, et
dramatique en la présence du Roi.

Pourtant, il arrive que le Roi sort dans les champs en dehors de la ville. Dans ces moments, n’
importe qui peut l’approcher. Le Roi reçoit chacun avec une face radiante. Le paysan derrière sa
charrue a accès au roi d’une façon qui reste inaccessible au plus haut ministre dans le palais.

Le mois d’Eloul, dit Rabbi Schenour Zalman, est quand le Roi est dans les champs.

Les champs.

Le pain est le ‘bâton de la vie’ qui ‘rassasie le cœur de l’homme.’ Il fut un temps ou tout le monde
labourait, plantait et récoltait le grain qui subviendrait a lui et a sa famille. Mais même aujourd’hui, ou
seulement un faible pourcentage d’entre nous sont des fermiers, nous travaillons tous pour du pain.
Tout le monde travaille dans un champs: soit un champs de blé ou de mais, ou dans le champs
financier, aciérie, médecine ou politique. Le champs représente le Spectrum entier de toutes les
secteurs professionnels.

En effet, le champs est le prototype primaire employé par la loi de la Torah pour différencier entre
les jours ‘saints’ et ‘mondains’. Dans la Mishna, le passage qui liste les travaux interdits le shabbat
dit :’ Les catégories de travail sont 40 moins une: labourer, planter, récolter, rassembler, …’
Chacune de ces activités représente une catégorie entière qui inclue plusieurs travaux. Par
exemple, niveler la terre pour faire un terrain de tennis est considérer comme labourer, mélanger du
ciment est une forme de pétrir etc… Mais c’est le travail du champs qui mène et domine la liste.
Dans les mots du talmud : ‘l’auteur de la Mishna suit le procédé de faire le pain.’

Pendant 11 mois de l’année, nos vies vacillent entre le champ et le palais, entre les poursuites
matérielles de la vie et les moments sublimes où l’on abandonne le procédé de faire le pain pour
entrer en la présence royale. Dans le mois d’eloul, cependant, le Roi est dans les champs.

Que se passe t-il quand le Roi vient dans les champs? Les champs ne sont pas transformés en un
palais, pourtant le roi n’en est pas moins Roi quand il salue le fermier dans sa salopette boueuse.
Sur son trône, dans l’aire sainte qui entoure le Roi , la sueur et le travail manuel du champs semble
a des milliers de kilomètres.
Comment ces 2 mondes se rencontrent et que se passe-t-il quand ils se rencontrent?

Pour comprendre l’essence d’Eloul, nous devons d’abord examiner la relation entre le palais et le
champs, entre shabbat et les jours de semaine, entre le concept de ‘Saints’ et ‘profane’. Sont ils
vraiment si distant l’un de l’autre que leurs facettes si différentes le suggèrent? Ou il ya –t-il une
connexion plus profonde entre eux, un dénominateur commun qui unit ces mondes divers?

Le Saint

Un coup d’œil au calendrier révèle que les jours profanes de l’année excèdent ceux qui sont saints.
Bien sur, il serait extrêmement difficile de gagner sa vie si la semaine serait compose d’un seul jour
de travail et de 6 jours de shabbat. Cela, cependant, découle de comment D-ieu nous a créé, nous
encombrant d’une innombrable panoplie de besoins matériels et nous plaçant dans un monde qui
demande un bon nombre de labourage, semence et récolte pour satisfaire ces besoins. Pourquoi D-
ieu nous a ordonné nos vies de façon a ce que nous devons investir le plus gros de notre temps et
énergie dans les poursuites matérielles? Comment est ce logique avec la mission que D-ieu nous a
charge au Mont Sinaï, d’être Son ‘royaume de prêtre et peuple Saint?’

La réponse est dans l’instruction de D-ieu au peuple d’Israël, après la révélation à Sinaï, pour
construire un édifice physique servant comme sanctuaire pour Lui. 15 matériaux ( incluant l’or, l’
argent, le bronze, le bois ,la laine et les peaux d’animal) doivent être employés pour être une ‘place
pour D-ieu dans le monde physique.’ La construction du sanctuaire représente le but du placement
de notre âme dans un corps et monde physique.
C’est pour influencer notre engagement matériel avec une intégrité et Sainteté en but, pour que
notre vie quotidienne devienne une ‘maison pour D-ieu, une demeure pour sa Bonté et perfection.
En effet, le Talmud nous dit que quand une âme monte au ciel après avoir complété sa vie terrestre,
la toute première question qui lui est posée- avant même les questions sur la ferveur de ses prières
ou la profondeur de son étude de la torah- est : ‘ as-tu été honnête dans ton business?’ Il n’y a pas
de place dans notre vie plus juste pour accomplir le but de ce monde que notre vie quotidienne.

Cela explique la façon plutôt ambiguë par laquelle la torah définit les travaux que nous ne pouvons
faire shabbat. Dans le 31 et 35eme chapitre de l’Exodus, le commandement de garder le shabbat et
les instructions de D-ieu pour construire le sanctuaire, sont juxtaposés. Le talmud explique que la
proximité de ces 2 lois, apparemment sans relation, est en fait pour nous apprendre que les 39
travaux que le sanctuaire nécessitait sont les mêmes 39 travaux interdits pour le Sahbbat:

Une personne est coupable de violer le shabbat seulement si le travail qu’il fait a sa contrepartie
dans les travaux du Sanctuaire: ils chargeaient la récolte dans les wagons, toi aussi tu ne porteras
pas du domaine public au domaine privé.

Dans d’autres mots, le travail qui occupe les jours ‘profanes’ de notre vie, et que nous devons
arrêter pendant le shabbat et les autres jours ‘saints’ de l’année, est un travail saint- le travail de
construire un ‘Sanctuaire’ pour D-ieu a partir de matières de la vie physique. Le mondain est
mondain seulement en apparence- une apparence qui est le résultat de l’opacité du monde matériel,
de la veine de la corporalité qui cache sa fonction sainte de servir a être une ‘demeure pour D-.’

Le quarantième travail

Mais si les jours profanes sont intrinsèquement Saints, que sont les jours ‘Saints’ dans notre vie ? Si
les jours Saints sont des jours ou la construction du Sanctuaire est supposée être a l’arrêt, quelle
relation, ont ils avec le but de la descente de nos âmes dans ce monde matériel? Shabbat est il
comme prendre des vacances de la vie?

Shabbat et les fêtes sont des élévations dans le terrain du temps, des points de mire pour une vue
transcendante sur ces plaines et vallées. Sans ces regards périodiques d’une perspective plus
haute, plus détachée, notre engagement dans le matériel peut devenir un engouement. Au lieu de
sanctifier le mondain, il peut nous profanés.

Au delà de sa surface mondaine, le monde matériel possède une vérité plus profonde- son potentiel
à recevoir la bonté et la perfection de Son Créateur. Le but de notre vie de travail quotidien est de
révéler ce potentiel, de développer le monde matériel comme une maison pour D-ieu. Mais, tous les
jours de notre vie, ce potentiel nous est invisible-obscurci par le procédé même qui sert a le révéler;
notre engagement même avec le matériel nous empêche de gouter son essence spirituelle. Pour
cela, il faut nous élever au dessus. Un jour ‘saint’ est un point dans le temps dans lequel nous
transcendons la superficialité mondaine de nos jours quotidiens pour apercevoir la vraie –et future-
face de notre monde.

Par conséquent la torah nous donne comme instruction : 6 Jours vous travaillerez et compléterez
vos taches. Le midrash est confus par l’expression “ fait tout ton travail” a priori il est impératif de
finir  tout le travail avant Shabbat ? Que se passerait-il si quelqu’un a un projet qu’il devrait finir
après un an ? Le midrash explique “ quand Shabbat arrive ton travail doit être considéré fini “
Une question se pose, le Shabbat n’est il pas un jour ou nous transcendons les jours de semaines
et notre rapport avec le travail matériel? N’est ce pas pendant Shabbat que nous devons voir le
monde matériel et le rapport avec le travail de la semaine, insignifiant?

Il est vrai que le Shabbat doit être un jour ou nous devons considérer notre travail comme s’il est fini,
un jour au dessus des jours de travail qui en fait nous permet de percevoir le but, de voir la finalité
de notre travail.

Et quand nous retournons dans notre vie mondaine , le Shabbat ou les jours de fêtes restent
attachés a notre vie quotidienne, qui est enrichie par l’energie  de la réalité, cette vie quotidienne
est fortifiée  par la vision de l’engagement que nous avons dans ce monde, notre vie mondaine a un
but et prend conscience de la vraie mission sans être détournée par la substitution de la réalité a
laquelle le monde veut nous faire adhérer.

Le roi

Pendant 11 mois dans l’année, notre vie est partagée entre le mondain  et les jours saints, entre le
travail et la vision spirituelle de notre mission dans ce travail. Pendant 11 mois, nous devons nous
arrêter de travailler  pour aller au dessus, pour avoir une vision de son âme et son but.
Le mois d’Eloul, le roi est dans les champs.
Le roi est l’âme et le cœur de la nation, c’est la personnification de son but et son aspiration.

Le roi, bien que séquestré derrière les murs de son royaume et sa bureaucratie, même si ce n’est
que par une vision rapide, à travers un voile d’opulence et de majesté, le roi est vraiment une part
du champ du fermier. Le roi est la raison d’être du fermier, chacun travail pour le roi. Est ce que l’
apparition du roi dans les champs est le faire sortir de son élément? Il est vrai que nous n’avons pas
l’habitude de le voir dans les champs. Est-ce que le roi ne se sert pas de ce blé pour subsister? Il
est vrai que le pain du roi est pétri dans le palais, il est vrai qu’il est livré par la porte de derrière du
palais, mais c’est ce pain qui le nourri et ce blé vient des champs.

Le roi en allant dans les champs a un contact direct avec ce qui est sa substance. Le champ est
visité par le roi pour sa raison d’être, pour sa fonction réelle.

Shabbat est le jour ou le fermier est invité dans le palais. Pendant Shabbat, sa routine est
remplacée par un comportement différent, son vocabulaire est plus raffiné, ses ongles et son âme
sont propres des résidus de la vie mondaine, Shabbat, le fermier est transféré de son domaine
fermier vers le palais du roi.

Eloul, par contre est le mois ou le roi se trouve dans les champs

Quand le fermier voit le roi dans les champs, est ce qu’il continue à labourer la terre ? Est ce qu’il va
se comporter comme un autre jour dans les champs? C’est sur que non. Eloul n’est pas un jour de
travail comme les autres. C’est un moment ou l’on doit rajouter dans l’étude de la torah, prier avec
plus de ferveur, donner plus la tzedaka.
L’air que l’on respire est différent et se transforme en sainteté. Il est vrai que nous nous trouvons
toujours dans les champs mais les champs deviennent une place plus sainte.

D’un autre coté, quand le fermier voit le roi dans les champs, est ce qu’il va courir chez lui pour se
laver et se changer? Va t-il s’habiller en habit adéquate pour recevoir le roi ?
Le roi vient dans les champs en fait pour communiquer directement avec la production de son pain
dans le domaine fermier.

Pendant le mois d’eloul, l’essence et le but de la vie deviennent plus accessibles .L’enveloppe
matérielle de la vie ne cache  ni ne déforme plus son but car le Roi visite.
Mais a l’inverse des jours saints de l’année, quand nous sommes élevés en dehors et au dessus de
notre travail quotidien, la rencontre de eloul se fait par notre physicalite, a l’intérieur de notre
environnement matériel, dans les termes de notre travail quotidien.
Le roi est dans les Champs

Le mois d'Eloul et la Techouvah

Refuge dans le Temps

Le 18 Eloul